Christiane BAUMGARTNER
Née en Allemagne en 1967 – Vit en Allemagne
Issue de l’Académie des Beaux-Arts de Leipzig puis du Royal College of Art de Londres, Christiane Baumgartner occupe une place marginale dans la création actuelle dans la mesure où elle a très tôt décidé de se spécialiser sur les différentes techniques de gravure, dont elle maîtrise parfaitement les moindres subtilités. Alors que de nombreux peintres utilisent la photographie comme base de travail à l’exécution de leurs œuvres picturales, choisissant ainsi d’opter pour une mise à distance de l’image initialement sélectionnée par son transfert en peinture, Christiane Baumgartner préfère quant à elle préserver les images dont elle se sert en les modifiant, en les affaiblissant. Formation I et Formation II sont ainsi à l’origine deux images découpées dans des documents d’archives historiques représentant une scène depuis longtemps entrée dans la mémoire collective puisqu’il s’agit du passage de bombardiers alliés pilonnant les villes d’Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale. Née à Leipzig, en pleine période de guerre froide, de l’autre côté du Mur, Christiane Baumgartner a été, comme bon nombre d’artistes est-allemands, considérablement marquée par le passé historique de son pays et par le paradoxe de cette fin de guerre qui, pour trouver son issue, a dû permettre la destruction massive des villes et des populations allemandes par une coalition dont l’objectif était justement leur libération du joug imposé par le nazisme. Affaiblies par leur transfert chimique sur du bois puis imprimées à l’aide des techniques de gravures sur de monumentales feuilles de papier, ces images de bombardier appartiennent indubitablement au patrimoine visuel de notre histoire et constituent en cela de véritables stéréotypes de toutes les guerres de la seconde moitié du 20ème siècle. Portant en elles les striures et les nervures du bois, elles en deviennent fantomatiques, comme projetées sur les écrans noir et blanc de moniteurs obsolètes. Cet affaiblissement de l’image, cette disparition, très visible sur la partie gauche du diptyque, est sans doute aussi une mise en garde contre la fragilité du legs historique, contre l’épuisement progressif de nos mémoires, une protestation contre l’oubli.