Patrick TOSANI
Né en France en 1954 - Vit en France
En savoir plus
Expositions
L’œil photographique Photographies – Collection du FRAC Auvergne et du Centre national des arts plastiquesEdition
L’oeil photographique – 2013Patrick Tosani accorde dans ses photographies une place essentielle à la tactilité de ses images, fouillant le réel dans ses moindres recoins, jusqu’à « rendre les choses photographiées
plus proches, pour ainsi dire touchables », comme il le déclare. Il en va d’une logique comparable avec Portrait n°12 et Portrait n°16. Les visages de ces portraits « aveugles » sont rendus à l’état de faces indéterminées dont seule la composition anthropomorphe permet de révéler la nature. S’exprimant sur la genèse de ces portraits, Patrick Tosani indique : « Ce rapprochement du toucher à la vue [m’a donné] l’idée d’utiliser un matériau neutre, moins réaliste, tel les feuilles d’écriture Braille. L’intention de ces portraits Braille est la suggestion de toucher avec les yeux par le transfert de la photographie. Il s’agit de la projection d’un portrait diffus sur une page d’écriture Braille. Les caractères sont effacés sur la totalité de la surface, exceptés sur le visage du modèle. La projection diffuse et floue a vocation, d’une part d’augmenter la présence et le relief des points, d’autre part de rendre l’identification du portrait impossible. Par la prise de vue photographique, ce relief minimum perd sa fonction de langage tactile. Il se transforme en signe visuel. La photographie aplatit définitivement ce volume infime. […] Ce travail repose sur le paradoxe de ne pas voir ce qui doit être vu, et de voir ce qui doit être seulement touché.1 » Par ces photographies, Patrick Tosani atteint un point aveugle de l’image dont les deux champs croisés – langage tactile et langage visuel – échouent dans une impasse. Cette impasse mène l’image dans une zone d’indiscernabilité qui lui confère toutes ses qualités. Ici, le Braille sans relief est le trompe-l’œil par excellence, dans son expression la plus littérale, redoublant l’aveuglement des visages par une cécité tactile. Ne s’agissant pas de portraits d’aveugles, ces œuvres pourraient sans doute être qualifiées de « portraits d’aveuglement » tant elles marquent l’éradication de la communication traditionnelle entre le regardeur et ce qu’il devrait être en mesure de voir ou de toucher.
Jean-Charles Vergne
1- Patrick Tosani, Entretien (extraits), http://www.patricktosani.com.